Contrepoint : Mahmoud Darwich

Publié le 05/11/2020 à 09:39 par poeguy Tags : coeur monde sur cheval saint chez air fleurs

New York. Novembre. 5° Avenue.

Le soleil est une soucoupe éclatée.

A l'ombre, j'ai dit à mon âme étrangère:

Cette ville est-elle Babylone ou Sodome ?

 

Là-bas, il y a trente ans, j'ai rencontré Edward

au seuil d'un abîme électrique haut comme le ciel.

Les temps étaient moins contraires.

L'un et l'autre nous avons dit:

Si ton passé est expérience,

que le lendemain soit sens et vision!

Partons,

allons à notre lendemain, assurés

de la sincérité de l'imagination et du miracle de l'herbe.

 

Ce soir-là, je ne sais plus si nous avons été au cinéma

mais j'ai entendu des Indiens

anciens m'interpeller:

Ne fais confiance ni au cheval ni à la modernité.

(...)

New York. Edward se réveille sur la paresse

de l'aube. Il joue un air de Mozart. Dispute

une partie de tennis sur le court de l'université. Médite

sur la migration de l'oiseau par-delà frontières et barrières.

Parcourt le New York Times. Rédige sa chronique

nerveuse. maudit un orientaliste qui guide un général

au point vulnérable du cœur d'une Orientale.

Se douche. Choisit un costume avec l'élégance d'un coq.

Boit son café au lait et crie

à l'aube: Ne traîne pas !

 

Extraits du recueil

Comme des fleurs d'amandier au plus loin

Mahmoud Darwich

Editions Sindbad

Actes Sud/ La Hune

 

Mahmoud Darwich, né en 1942 à Birwa, près de Saint-Jean-d'Acre, et décédé en  2008 à Houston, est unanimement considéré comme l'un des plus grands poètes contemporains. Auteur de plusieurs ouvrages maintes fois réédités et traduits partout dans le monde, il a publié chez Actes Sud: Au dernier soir sur cette terre ( poèmes, 1994 ); Pourquoi as-tu laissé le cheval à sa solitude ? ( poèmes, 1996 ); Une mémoire pour l'oubli ( récit, 1994 ),..